giovanni bosco
dottore di tutto 2
Né en 1948, le sicilien Giovanni Bosco - d’abord berger puis ouvrier dans une carrière de marbre - sombra dans la psychose à la suite de l’assassinat de deux de ses frères par la mafia. L’institution psychiatrique et la prison à laquelle il fut condamné un an à la suite, semble-t-il, d’un vol de bétail, ne lui ôtèrent ni son sourire désarmant, ni sa propension à transformer son existence démunie en un acte de poésie pure. À Castellamare del Golfo, à l’ouest de Palerme, ses journées furent alors rythmées par les chansons populaires napolitaines et les peintures d’une inventivité rare qu’il exécutait sur les murs de sa ville ou sur des matériaux de fortune. Au moment où son génie est enfin reconnu – grâce aux efforts du photographe Boris Piot -, il est emporté par un cancer en 2009.
Sa première exposition monographique lui fut consacrée par notre galerie dès 2011, accompagnée d’un catalogue avec des textes de l’historienne de l’art contemporain Eva Di Stefano et du critique Jean-Louis Lanoux. Depuis lors, son oeuvre a fait l’objet de nombreuses tentatives de décryptage et un film retraçant les derniers mois de sa vie a été produit par des étudiants qui furent parmi ses derniers amis, tandis qu’un projet de restauration et de conservation de ses fresques est envisagé. À son tour, la Collection de l’art brut, à Lausanne, organisait une rétrospective en 2013 en même temps que paraissait une étude sur son oeuvre dans le Fascicule de l’Art Brut # 24.
Ce qui frappe de prime abord, dans cet oeuvre, c’est qu’il ne semble débiteur d’aucune influence, échappant, de fait, à tout rapprochement hasardeux.
« Bosco était traversé par la pensée visuelle » écrit Di Stefano, une façon de souligner que la complexité et l’originalité de ses réalisations trouveraient leur seule source dans les arcanes inextricables de sa psyché.
Ses compositions irriguées de rouge et savamment agencées, ses coq-à-l’âne formels, ses homoncules hybrides, ses avatars musculeux, ses membres votifs, ses glissements du glyphe à l’organique, et réciproquement, finissent par y égrener l’alphabet d’une langue secrète, intime. Un peu comme si l’on assistait à un soliloque graphique de la plus haute intensité. Giovanni Bosco, en mélancolique dottore di tutto, accablé de tous les malheurs, avait trouvé dans l’art un remède absolu.
Les journées du sicilien Giovanni Bosco furent rythmées par des chansons populaires napolitaines et des peintures d’une inventivité rare qu’il exécutait sur les murs de sa ville ou sur des matériaux de fortune : corps démembrés ou “surmembrés”, serpenteaux et homoncules, coeurs céphaliques, mots et signes scandés dans l’intervalle du dessin. Inventeur d’un langage plastique sans pareil, l’artiste fait aujourd’hui partie de prestigieuses collections dont celles d’Antoine de Galbert, abcd/Bruno Decharme (France), Treger-Saint Silvestre (Portugal) et Amr Shaker (Suisse).
Préface : Eva Di Stefano & Jean-Louis Lanoux
Avant-propos : Christian Berst.
Publié à l’occasion de l’exposition Giovanni Bosco : dottore di tutto 2, du 8 mars au 14 avril 2018.