Augustin Lesage
Augustin Lesage, né 1876 à Saint-Pierre-Lez-Auchel (Pas-de-Calais), est issu d’une famille de mineurs : à 14 ans, après son certificat d’étude, il descend à la mine. C’est en bas, dans un de ces périlleux tunnels qu’en 1911 « [il] enten[d] une voix, une voix très nette dire ”un jour tu seras peintre” ».
De peur de passer pour fou, il tait cet événement; néanmoins, quelques mois plus tard, lorsqu’un ami évoque l’existence du spiritisme, Lesage s’y intéresse avec force et s’y livre. Lors d’une séance, un message écrit par les esprits lui confirme sa vocation d’artiste et, sous leur dictée, il exécute aux crayons de couleur des dessins non figuratifs à la graphie spiralée.
Redoublant d’exigence, les esprits insufflent bientôt à Lesage de délaisser les crayons au profit de l’huile. Le mineur s’exécute : sa première toile, très grande (3 m²) révèle un nouveau style où la composition géométrique prédomine. Les peintures suivantes, d’une rigueur et d’une régularité extrême, sont révélatrices d’une méthode spécifique : Lesage procède par niveau, il peint lignes après lignes sa toile, appliquant les touches d’une même couleur d’une seule fois sur la verticale traitée.
Progressivement, le mineur-peintre-médium acquiert une grande renommée si bien qu’après la guerre, Jean Meyer, directeur de la Revue Spirite et fondateur de la Maison Spirite et de l’institut métapsychique international lui offre sa protection. D’abord réticent, Lesage, souffrant d’un emphysème peu compatible avec le travail de la mine, finit par accepter. Ainsi, il s’installe avec femme et enfants à Paris et se consacre pleinement à la peinture.
Journalistes, médecins, artistes, ethnologues se pressent pour voir le médium à l’œuvre : Lesage, qui n’est entré qu’une fois dans un musée en 1899, devient le peintre officiel du mouvement spirite, intéresse au plus haut point André Breton, les surréalistes puis Dubuffet et est aujourd’hui un « classique » de l’art brut.
Son œuvre figure parmi les plus grandes collections d’art dont celle, grâce à la donation Daniel Cordier, du Musée National d’Art Moderne (Paris). Malgré le succès de sa créativité, Lesage ne vendra jamais une toile à un prix excédant celui du matériel utilisé additionné au temps passé qu’il calcule sur la base du salaire horaire du mineur. Il n’aura de cesse de répéter : « C’est de l’art de l’au-delà, cela ne vient pas de moi ».
Préface : Bruno Decharme
Avant-propos : Christian Berst
Publié à l’occasion de l’exposition Art brut, masterpieces et découvertes : carte blanche à Bruno Decharme, du 21 octobre au 29 novembre 2014.