staged bodies
group show
Ces six photographes bruts ont pour dénominateur commun d’envisager le corps comme scène intime, transgressive et obsessionnelle. Ces staged bodies (corps mis en scène) — transformés, fétichisés, suturés — s’affranchissent des normes esthétiques et morales, façonnés par le désir, la pulsion et la nécessité d’exister autrement.
Comme chaque tirage est unique, il s’exhale de ces clichés ce que Walter Benjamin distinguait comme « l’aura » d’une œuvre d’art.
Tous projettent sur le corps une fiction mentale où la photographie ne se contente plus de documenter : elle agit, rejoue et déplace le réel.
Tomasz Machciński (1942–2022) mène durant 50 ans une quête effrénée d’identité à travers plus de 22 000 autoportraits dans lesquels il incarne une multitude de personnalités, hommes comme femmes. Tandis que Lubŏs Plný (né en 1961) transforme son propre corps en terrain d’expérimentation, entre coutures, collages, incisions et stigmates, gestes de réinvention, de connaissance de soi et de ses limites.
Jorge Alberto Cadi (né en 1963) fragmente et assemble en les cousant des photographies sauvées de la destruction pour faire surgir des corps hybrides, mystiques et ambigus, alors que Miroslav Tichý (1926–2011), avec son appareil photographique bricolé, magnifie secrètement les femmes qu’il croise dans la rue, construisant un univers de désir et de distance.
Le Fétichiste, (anonyme actif entre 1996 et 2006), explore par ses prises de vue sa fascination pour les jambes gainées de collants, allant parfois jusqu’à les revêtir lui-même.
John Kayser (1922–2007), quant à lui, expérimente à travers ses mises en scène un érotisme jubilatoire et irrévérencieux avec la complicité de ses modèles.