Jorge Alberto Cadi
Dans les rues de La Havane, Jorge Alberto Cadi n’est connu que comme « El Buzo » - le plongeur-, constamment à la recherche de matériel pour ses œuvres, dans les objets délaissés de la ville. Boltanskien dans son usage mémoriel de la photographie, warholien lorsqu’il coud des greffons d’images entre eux, Cadi cherche avant tout à révéler ce que les images cachent. Exposé pour la toute première fois en 2019 par la galerie, puis en 2022 à Paris Photo, il a été présenté la même année dans le 2e volet de Photo brut qui, après les Rencontres de la photographie d’Arles, a été accueilli à la Centrale et au Botanique, à Bruxelles. Son œuvre fait notamment partie des collections du Musée national d’Art moderne (Pompidou). En 2023, il a été exposé par Sophie Calle au Musée Picasso.
Dans les rues de La Havane, Jorge Alberto Hernández Cadi n’est connu que comme « El Buzo ». Cet artiste cubain atteint, comme son frère, de schizophrénie porte le surnom de « plongeur » parce qu’il est constamment à la recherche de matériel pour ses œuvres parmi les objets délaissés de la ville.
C’est sur les côtés extérieur et intérieur de contenants tels que des valises, des boîtes en laiton ou en bois que Cadi colle des photographies en noir et blanc sur lesquels il intervient au stylo bleu. Ainsi, des scènes familiales attendrissantes se transforment en images grotesques, voire sataniques, où les personnages sont privés de leurs visages ou caractérisés par des traits diaboliques comme de longues oreilles, des cornes ou des griffes. Loin d’aborder le thème de la perte d’identité, les visages arrachés réapparaissent de manière macabre sur d’autres parties de la composition. Ils ne sont alors pas seulement collés mais littéralement cousus sur le support.
Comme il l’exprime, ces photographies anonymes d’un autre temps parlent de l’émigration, des départs, des adieux, des séparations qui ont marqué son pays. De même cette prédilection pour les valises. « Quand tu fermes la valise, tu réunis des personnes qui ne se sont jamais vues. Ils retournent voyager… Parfois dans une autre dimension ». Il est aussi question de ce qui a été cousu et s’est décousu, ce qui se reprend. “Nous sommes un peu cousus par le temps.” confie-t-il.
Adepte de gymnastique méditative et des arts martiaux (Karaté, Judo, Wing Tsun), Cadi pratique, outre le collage, le dessin et la poterie.
Avec Misleidys Castillo Pedroso, Cadi est l’un des représentants les plus connus de l’art brut cubain.
Avant-propos : Christian Berst.
Publié à l’occasion de l’exposition Jorge Alberto Cadi : el buzo, du 12 octobre au 23 novembre 2019.