Tomasz Machcinski
Très jeune, Tomasz Machciński se construit une identité autour d’un autographe, qui lui a été adressé par une actrice qu’il imagine alors être sa mère. De cette confusion, qui a duré plus de vingt ans, est née de multiples autoportraits d’autant de physionomies différentes. Exposées aux Rencontres d’Arles en 2019 et acclamées par la presse à Paris Photo en 2021, ses œuvres font partie des collections du MAM de Varsovie et du Musée de la Photographie de Cracovie. En 2023, il est exposé au Centre d’Art Contemporain Genève dans Chrysalides : le rêve du papillon. Cette année, ses autoportraits sont présentés à l’Independent Art Fair à New York ainsi qu’à l’occasion d’un solo show à la galerie en septembre 2024.
Tomasz Machciński est un photographe et performeur autodidacte. Orphelin de guerre, il a reçu, en soutien, un autographe de l’actrice hollywoodienne Joan Tompkins, avec la mention « Avec amour à Tommy de Mère Joan ». Ce cadeau lui a été fait dans le cadre d’un programme dit d’adoption à distance. Pendant les vingt premières années de sa vie, il était donc convaincu que Joan Tompkins était sa mère. Après toutes ces années d’identification à la star c’est comme si son « rêve américain » prenait soudainement fin.
La perte de cette identité supposée a beaucoup influencé le travail artistique de Machciński. À ce jour, son œuvre comprend plus de 22 000 identités fictives ou appropriées, dont seulement 1 500 sur le marché, saisies dans des autoportraits photographiques et cinématographiques.
S’il exerce le métier de mécanicien, pendant son temps libre, l’artiste incarne avec nonchalance des stars du grand écran, des icônes de la culture pop, des figures de l’Histoire, de la littérature et de la politique, et d’autres individus excentriques.
Son travail dépeint une variété de personnages de différentes appartenances ethniques, sexuelles ou sociales. En même temps, ces rôles deviennent aussi des réinventions de sa propre identité. « Au lieu de perruques ou d’artifices, je montre tout ce qui arrive à mon corps, comme : la repousse des cheveux, la perte des dents, les maladies, les processus de vieillissement, etc. » Dans son travail, Machciński est à la fois metteur en scène et acteur, maquilleur et costumier, archiviste, photographe et artiste de performance.
D’une part, sa pratique artistique est liée à l’histoire de l’art européen en jouant avec les méthodes traditionnelles de représentation et ses conventions. D’autre part, elle s’inscrit dans la stratégie de la photographie conceptuelle qui utilise l’image de soi comme un théâtre de symboles et de signes, présente également dans les œuvres de Cindy Sherman ou Luigi Ontani. Ses photographies ainsi que ses vidéos sont des performances réalisées directement devant la caméra.
Tomasz Machciński s’impose déjà comme une figure prépondérante de la photographie brute, à l’instar de Miroslav Tichy, Lee Godie, Eugene Von Bruenchenhein, qui n’ont été reconnus par le monde de l’art institutionnel que récemment. En 2018, la Fondation Tomasz Machciński est créée et ses films sont projetés l’année suivante à la Whitechapel Gallery (Londres). Cette même année, il participe aux Rencontres de la Photographie (Arles) dans l’exposition PHOTO l BRUT, collection Bruno Decharme & compagnie. En 2020, il est exposé à l’American folk art de New York, et une grande exposition rétrospective va lui être consacrée par le Manggha (Cracovie) de mai à septembre 2021. Pour sa première participation à Paris Photo en 2021, la galerie christian berst art brut a exposé le travail de Tomasz Machciński.
En mai 2024, à l’occasion de l’exposition des photographies de Machciński à independent Art fair, le journaliste Will Heinrich écrit dans The New York Times « For me, the fair’s most memorable event will be the American debut of the Polish photographer Tomasz Machciński (1942-2022), who started dressing up in character and shooting thrilling dangerous and vital self-portraits in the early 1960s. »