Eugène Gabritschevsky
Héritier de l’aristocratie russe du XIXe, ce biologiste de renom sombre dans la folie alors qu’il est à l’apogée de sa carrière scientifique. Interné en Allemagne, il se lance alors corps et âme dans la création de pages par milliers couvertes de gouaches, fusain ou aquarelle ; ouvrant ainsi, tel une fenêtre dans sa cellule une fuite vers univers infini, une échappée métaphysique. Ses œuvres fantastiques quand elles ne sont pas abstraites, sont peuplés de personnages fantomatiques : monstres hybrides, insectes multicolores, personnages aux yeux démesurés, ou petits êtres aux allures de mutants.
Son Gabritschevsky, qui captiva entre autres Daniel Cordier et Jean Dubuffet, figure dans d’importantes collections d’art au monde dont celle, grâce à la donation Cordier, du Centre Pompidou.
Eugène Gabritschevsky, né en 1895 à Moscou dans la haute aristocratie russe, connait une carrière fulgurante en tant que biologiste avant de sombrer dans la folie. Son père, bactériologiste, l’initie à la science si bien qu’Eugène devient rapidement spécialiste de renom des questions d’hérédité, travaille aux États-Unis, puis à Paris à l’Institut Pasteur. Conjointement à son activité scientifique, le jeune homme peint, à ses heures perdues, des productions d’inspiration expressionniste.
La révolution russe éclate et se manifestent ses premiers troubles du comportement qui le mènent 12 ans plus tard à l’hôpital psychiatrique de Haar (près de Munich) où il demeure jusqu’à son décès, en 1979. Ce qui jadis constituait une occupation du dimanche devient alors subitement une activité effrénée: durant trois décennies, il peint et dessine sans répit sur ce qui lui tombe sous la main -calendriers, magazines, circulaires administratives, etc.- au moyen de fusains, de mines de plomb, d’aquarelle et de gouache. C’est alors un univers multiple qu’il étrenne : si nombre de ses œuvres sont fantastiques, peuplées de personnages fantomatiques, étrangement inquiétants, où règne une atmosphère fascinante, plusieurs autres s’avèrent non figuratives, tachistes. Eugène aime tout particulièrement laisser une large place au hasard dans l’ensemble de sa création et s’amuse a faire apparaître des formes en passant aléatoirement une éponge ou un chiffon sur la peinture préalablement étalée, ou en usant de pliages.
Préface : Raphaël Koenig.
Avant-propos : Christian Berst.
Publié à l’occasion de l’exposition In abstracto #2, du 5 mars au 30 mai 2020.