Eric Benetto
Profondément marqué par la découverte d’Augustin Lesage, Éric Benetto arpente les voies spirituelles les plus ardues : vie monastique et pratiques ascétiques de l’hésychasme orthodoxe. Ses dessins, à l’encre de Chine ou au crayon, sur papier, radiographies et autres clichés d’IRM sont empreints d’un mysticisme syncrétique pétri de modernité. Avant sa première exposition personnelle à la galerie en 2019, son travail avait déjà été remarqué lors de l’exposition Brut Now : l’art brut au temps des technologies, aux musées de Belfort. Il a, depuis, rejoint des collections aussi prestigieuses que celles de Laurent Dumas (France), Treger-Saint Silvestre (Portugal) ou la Pinacothèque (Luxembourg).
Pour Éric Benetto, né en 1972 à La Roche-sur-Yon, la découverte – à l’âge de 17 ans – de l’œuvre médiumnique du mineur de fond Augustin Lesage fut une véritable épiphanie. Sa rencontre avec l’Abbé Coutant, devenu lui-même peintre grâce à son ami Gaston Chaissac, le marqua tout autant. Profondément méditatif, foncièrement farouche, Benetto comprit alors que son sentiment d’exil trouverait dans l’art une issue insoupçonnée.
Tandis qu’il exerce, entre deux voyages en Inde, les métiers les plus divers : cantonnier, sondeur téléphonique, gardien d’usine chimique, et tant d’autres, il commence à transcrire dans des carnets de voyage ce qui deviendra sa grammaire formelle. Comme une prière jamais interrompue, une récitation silencieuse, vertigineuse, un mantra graphique obsédant.
Bientôt, l’encre de Chine, surtout, et le crayon, parfois, viendront conquérir des surfaces plus importantes. Du papier kraft, d’abord, avant qu’à la faveur d’un emploi dans un hôpital il ne découvre les potentialités des radiographies et autres clichés d’IRM : tout à la fois transparence et ténèbres en quête de lumière. Sa plume gagnée par la transe fera le reste.
Tandis que les motifs sont répétés ad libitum et que les incantations sérielles se déploient comme l’aum primordial, l’artiste donne corps à ce que Romain Rolland appelait le « sentiment océanique », cette formidable soif d’osmose avec l’univers. Dans le cas de Benetto, il s’étend des limbes aux hommes. Urbi et orbi. En particulier lorsque ses assemblages de clichés par résonance magnétique sont constellés de négatifs de photographies de ceux qu’il appelle sa « famille terrestre ». Ou quand la pérégrination mémorielle se double d’un élan rédempteur. Et que dire de ces organes affranchis de leur condition, réinventés, poétisés, sublimés.
Éric Benetto n’a jamais cessé d’arpenter les voies spirituelles les plus ardues, des rigueurs de la vie monastique aux pratiques ascétiques de l’hésychasme orthodoxe. Son extrême humilité l’empêchera toutefois d’admettre sa singularité, car l’œuvre qu’il a conçu n’est pas seulement empreint d’un mysticisme exacerbé, syncrétique, mais aussi d’une exceptionnelle modernité.
Son travail a été particulièrement remarqué en 2016 lors de l’exposition Brut Now : L’art brut au temps des technologies, aux musées de Belfort et fait partie de collections majeures, tant d’art brut que d’art contemporain.
Avant-propos : Christian Berst.
Publié à l’occasion de l’exposition Éric Benetto : in excelsis, du 26 janvier au 2 mars 2019.