Zdenek Košek
Typographe de formation, Košek devient tout d’abord un artiste assez conventionnel. Lorsqu’il sombre dans la psychose, il se met à produire des œuvres aussi radicales que poétiques. Persuadé qu’il joue un rôle déterminant dans l’ordonnancement du monde, il passe son temps à sa fenêtre, à consigner ses observations – météorologie, vols des oiseaux, faits insignifiants – et à les agréger en diagrammes censés conjurer le chaos. Depuis quinze ans, du Palais de Tokyo à la Maison Rouge, au MONA (Australie) en passant par le DOX de Prague et Les Rencontres d’Arles, ses cartographies sibyllines ne cessent d’interroger à travers le monde.
Zdeněk Košek a d’abord été typographe et caricaturiste pour des magazines et des journaux régionaux. Artiste autodidacte, il a commencé à produire une peinture de facture plutôt conventionnelle. Dans les années 80 il subit un grave traumatisme dont les conséquences psychiques sont irrévocables. Diagnostiqué psychotique il est mis à la retraite en 1989. Dès lors il va produire une œuvre radicalement différente de ses peintures antérieures. Košek était persuadé qu’il jouait un rôle déterminant au sein de la grande ordonnance du monde dont le temps météorologique est le vecteur.
« J’étais le maître du monde et j’avais l’énorme responsabilité de résoudre tous les problèmes de l’humanité. Si je ne les résolvais pas, qui d’autre le ferait ? » Il se voyait comme une sorte de centrale recevant et émettant sans cesse des multitudes d’informations et pensait devoir maîtriser les problèmes météorologiques.
« Je ne maîtrisais pas seulement le temps mais aussi la politique, j’ai nommé Vaclav Havel président de la République. […] Je me croyais immortel ».
Il passait ses journées devant la fenêtre de son HLM afin de contrôler le temps - direction des vents, vol d’oiseaux, bruits, changements de température, pensées - et dessinait sur des cahiers d’écolier, sur des cartes d’atlas ou dans de vieux magazines. Ses diagrammes sont un rituel dicté, indispensable, auquel il doit se soumettre au risque d’être responsable d’un chaos irréversible. En collant ses diagrammes contre les vitres de son appartement, il communiquait aussi avec les oiseaux, qui étaient pour lui des êtres supérieurs aux hommes.
Pour sa réouverture en 2012, le Palais de Tokyo (Paris) lui a consacré une exposition. Zdeněk Košek a également a été récemment exposé à deux reprises à la Maison rouge : Le Mur, oeuvres de la collection Antoine de Galbert et art brut, collection abcd/Bruno Decharme, puis dans Le bord des Mondes au Palais de Tokyo en 2015.
Textes : Barbara Safarova, Jaromír Typlt, Manuel Anceau
Avant-propos : Christian Berst
Publié à l’occasion de l’exposition zdeněk košek : dominus mundi, du 3 septembre au 10 octobre 2020.